Dix-septième Rapport annuel du Département d’Etat US sur la Traite des Personnes – Mauritanie 2016 (version française)

logo us depMAURITANIE (CATÉGORIE 3)
Le gouvernement mauritanien ne se conforme pas intégralement aux normes minimales pour l’élimination de la traite des personnes et n’entreprend pas d’efforts significatifs à cet effet ; par conséquent, la Mauritanie est demeurée dans la catégorie 3. Malgré l’absence d’efforts, le gouvernement a cependant pris certaines mesures pour lutter contre la traite. Comme prévu par la loi de lutte contre l’esclavage de 2015, le gouvernement a établi trois tribunaux régionaux dotés d’une compétence exclusive en matière de traite des personnes et d’esclavage héréditaire, et a poursuivi et condamné deux propriétaires d’esclaves – ses premières condamnations en vertu de la loi de lutte contre l’esclavage de 2015 et ses deux premières condamnations pour infraction liée à la traite depuis 2011. Cependant, les tribunaux anti-esclavage ne recevaient pas de ressources financières suffisantes et les pouvoirs publics n’ont pas dispensé aux juges de formation sur les lois de 2003 sur la lutte contre la traite et de 2015 sur la lutte contre l’esclavage, ce qui limitait l’efficacité globale du gouvernement en matière d’enquêtes et de poursuites dans le cadre de ces affaires. En ne les reconnaissant pas officiellement, le gouvernement a continué d’empêcher certains groupes de lutte contre l’esclavage de lancer des poursuites au pénal contre des propriétaires d’esclaves et aurait torturé certains des défenseurs de ces organisations. Malgré des rapports de longue date indiquant que des procureurs et des juges refusaient de poursuivre de soi-disant propriétaires d’esclaves ou qu’ils les poursuivaient pour des infractions moins graves afin d’éviter de lancer un procès pour esclavage, le gouvernement n’a pas enquêté sur ces allégations. Bien que des ONG aient consigné plus de 7 100 affaires d’enfants travaillant comme domestiques avec des signes de travail forcé et que la police ait identifié plus de 649 victimes de l’esclavage d’enfants et de la mendicité forcée en 2016, les pouvoirs publics n’ont enquêté sur aucune de ces affaires ou soustrait de victimes des situations d’exploitation dans lesquelles elles se trouvaient. L’Agence Tadamoun, l’organe public chargé de traiter les problèmes de la pauvreté et des « séquelles de l’esclavage », a continué de fournir des efforts visant à réduire les inégalités socioéconomiques, sans toutefois remplir son rôle d’enregistrement d’affaires au pénal au nom des victimes et de représentation de ces dernières contre leurs trafiquants ou propriétaires présumés. Les organes publics chargés de la lutte contre la traite et l’esclavage ont continué de manquer des ressources, du personnel et de la volonté politique nécessaires pour poursuivre les auteurs d’infractions jouissant de relations politiques ; il demeurait une absence fondamentale d’engagement à la prise d’efforts sérieux et soutenus visant à combattre l’esclavage héréditaire.
RECOMMANDATIONS À L’INTENTION DE LA MAURITANIE
Accroître sensiblement les efforts visant à enquêter sur les infractions et poursuivre en justice, condamner et punir les auteurs de la traite des personnes et les propriétaires d’esclaves à l’aide de peines suffisamment sévères au titre des dispositions de la loi de 2003 sur la lutte contre la traite des personnes et de la loi de 2015 contre l’esclavage ; rendre les fonctionnaires de l’État complices de crimes de traite des personnes responsables de leurs actes, notamment ceux n’ayant pas mené d’enquêtes sur les cas allégués d’infraction à la législation relative à l’esclavage et ayant tenté d’entraver les enquêtes en cours ; allouer des ressources financières suffisantes aux tribunaux anti-esclavage et dispenser une formation aux procureurs et au personnel judiciaire sur la loi de 2003 contre la traite des personnes et à celle de 2015 contre l’esclavage ; faciliter l’accès des victimes à l’aide juridique et accroître les efforts de la Tadamoun pour déposer de plaintes au pénal au nom des victimes ; protéger les victimes qui prennent part aux enquêtes juridiques de l’intimidation et des menaces des trafiquants ou propriétaires d’esclaves présumés ; élaborer des procédures normalisées pour l’identification des victimes de la traite et de l’esclavage et leur orientation vers les services de prise en charge, et former les forces d’application de la loi à ces mesures ; en coordination avec les ONG, accroître les efforts visant à fournir des services de protection et de formation professionnelle aux victimes ; enquêter sur les personnes accusées de recruter frauduleusement des Mauritaniens à l’étranger en vue de les exploiter et les poursuivre en justice ; avec des apports de la société civile, élaborer et mettre en œuvre un plan visant à fournir des ressources économiques, par des aides monétaires ou foncières, dans le but de donner aux anciens esclaves et aux membres des castes traditionnellement esclaves les moyens, s’ils le souhaitent, de quitter les communautés où ils vivent en esclavage ; affecter du personnel à la mise en œuvre de la stratégie nationale de lutte contre la traite des personnes ; sensibiliser le public à la traite des personnes, y inclus à l’esclavage héréditaire et à la loi de 2015 relative à la lutte contre l’esclavage ; et reconnaître juridiquement toutes les ONG légitimes de lutte contre la traite des personnes et l’esclavage, notamment l’Initiative de résurgence du mouvement abolitionniste.
POURSUITES JUDICIAIRES
Le gouvernement a intensifié modestement ses efforts de répression de la traite des personnes. Quasiment toutes les formes de traite sont interdites par la loi mauritanienne de 2003 contre la traite des personnes, qui prescrit à l’encontre des contrevenants des peines de cinq à dix ans de prison, lesquelles sont suffisamment sévères et dépassent celles prescrites pour d’autres infractions graves telles que le viol. La loi de 2015 contre l’esclavage érige l’esclavage héréditaire en infraction criminelle et prescrit à l’encontre des contrevenants des peines de cinq à vingt ans de prison, lesquelles sont suffisamment sévères et dépassent celles prescrites pour d’autres crimes graves. Elle comprend également différentes interdictions relatives au mariage forcé. Elle prévoit en outre l’établissement de tribunaux régionaux de lutte contre l’esclavage dotés d’une compétence exclusive en matière de traite et d’esclavage ; au cours de la période visée par le présent rapport, le gouvernement a ouvert et rendu opérationnels les trois tribunaux prévus, à Néma, Nouakchott et Nouadhibou. Les tribunaux ne disposaient pas du personnel, du financement et des ressources nécessaires aux enquêtes et aux poursuites relatives aux infractions liées à la traite des personnes et à l’esclavage dans l’ensemble de leurs régions respectives, et aucun des juges nommés n’a reçu de formation spécifique pour faire face aux défis uniques que sont les enquêtes dans le cadre des affaires d’esclavage, notamment sur les méthodes à leur disposition pour empêcher les propriétaires d’esclaves d’intimider leurs victimes et éviter que celles-ci retirent leur plainte.
Les tribunaux anti-esclavage ont reçu 47 affaires pour enquêtes en vertu de la loi de 2015 contre l’esclavage, impliquant au moins 53 suspects, et ont poursuivi et condamné deux propriétaires d’esclaves, par rapport à deux enquêtes et aucune poursuite ou condamnation au cours de la période visée par le rapport précédent. Le tribunal anti-esclavage de Néma a clos une enquête commencée au cours de la période précédente ayant mené à la condamnation de deux propriétaires d’esclaves à cinq ans de prison, dont un an ferme et quatre ans avec sursis, et au versement par chacun d’une amende de 100 000 ouguiya mauritaniens (MRO) (soit 282 dollars É.-U.) et d’un million d’ouguiya (soit 2 817 dollars É.-U.) de dommages-intérêts à chacune de deux victimes. Il s’agissait là des premières condamnations par les pouvoirs publics en vertu de la loi de 2015 de lutte contre l’esclavage et de leurs premières condamnations pour traite ou esclavage depuis 2011 ; cependant, en condamnant les deux propriétaires d’esclaves à une peine de prison essentiellement avec sursis, le juge a minimisé l’effet dissuasif de ces mesures de répression. Les trois tribunaux régionaux avaient quarante-six enquêtes en cours dans des affaires d’esclavage, dont dix-sept lancées au cours de la période visée par le rapport précédent. En 2016, la brigade spéciale des mineurs a identifié 649 enfants victimes de l’esclavage et de la mendicité forcée ; le gouvernement n’a pas signalé avoir lancé d’enquêtes sur des trafiquants ou propriétaires d’esclaves suspectés dans aucune de ces affaires. Au cours de la période visée par le présent rapport, la Cour d’Appel de Nouakchott s’est prononcée en faveur de deux anciens esclaves qui faisaient appel de la clémence dont avait bénéficié leur propriétaire au cours de sa condamnation, en 2011. Si la cour a confirmé la peine originale de deux ans de prison avec remise en liberté après trois mois, peine déjà servie par l’intimé, elle a cependant également augmenté la compensation accordée aux victimes, ordonnant au coupable de payer un montant total de 2 248 000 ouguiya (soit 6 332 dollars É.-U.).
Les efforts de lutte contre l’esclavage héréditaire sont restés faibles. En dépit de l’instruction qu’elle avait reçue, la Tadamoun n’a pas déposé pendant la période visée par le présent rapport de plaintes au pénal au nom des victimes. La loi de 2015 de lutte contre l’esclavage autorise les associations de défense des droits de l’homme établies et fonctionnant légalement depuis au moins cinq ans à déposer des plaintes au pénal au nom de victimes ; il est cependant interdit à l’une des principales ONG mauritaniennes de lutte contre l’esclavage, dont le gouvernement ne reconnaît pas l’existence juridique, de le faire. Au cours de la période visée par le présent rapport, il a été signalé plusieurs fois que les autorités avaient torturé des membres de cette organisation de lutte contre l’esclavage pendant leur garde à vue par la police pour avoir soi-disant participé à une émeute ; plusieurs de ses membres ont été complètement acquittés ou vu leur verdict cassé. Certains défenseurs ont prétendu que les actes de torture présumés avaient pour objectif de les dissuader de poursuivre leur plaidoyer abolitionniste. Au cours de la période précédente, les pouvoirs publics ont condamné trois activistes à deux ans de prison pour plaidoyer abolitionniste. En mai 2016, le gouvernement a réduit les peines de deux activistes toujours en prison de deux ans à un an d’emprisonnement (alors qu’ils avaient déjà servi dix-huit mois), les libérant sans toutefois infirmer leur condamnation. Les pouvoirs publics ont continué leurs enquêtes commencées au cours des périodes visées par les rapports précédents concernant un dirigeant tribal, ancien colonel de l’armée, pour complicité présumée de traite de personnes ; ils n’ont cependant pas signalé de poursuites ou de condamnations pour des responsables publics complices d’infractions liées à la traite de personnes. Il a subsisté de graves préoccupations en matière de corruption et de complicité, notamment des signalements selon lesquels des policiers, procureurs et juges auraient refusé de lancer des enquêtes et d’entamer des poursuites dans des affaires d’esclavage héréditaire et d’importantes pressions des autorités sur le judiciaire, ce qui limitait son indépendance. On a également continué de signaler que des procureurs et des juges poursuivaient souvent des propriétaires d’esclaves présumés pour des infractions moins graves de manière à éviter un procès pour esclavagisme, ce qui mettait en doute la volonté politique de faire appliquer la loi et des responsables judiciaires de traiter ce type d’infraction. Bien que les pouvoirs publics aient reconnu que les fonctionnaires de la police et de l’appareil judiciaire ne disposaient pas de la compréhension critique nécessaire pour mener des enquêtes sur la traite des personnes et assimiler la loi de 2015 de lutte contre l’esclavage, ils ne leur ont cependant pas dispensé de formation sur ces sujets au cours de la période visée par le présent rapport.
PROTECTION
L’État mauritanien a continué de consentir des efforts minimaux en matière de protection des victimes de la traite, notamment des personnes exploitées dans le cadre de l’esclavage héréditaire. La brigade spéciale des mineurs a identifié plus de 649 enfants victimes de l’esclavage et de la mendicité forcée, et les tribunaux ont signalé au moins 46 victimes impliquées dans le cadre de 46 enquêtes. Les ONG n’ont pas glané de statistiques exhaustives sur les victimes de la traite, mais plusieurs ont signalé avoir identifié des nombres importants d’enfants potentiellement victimes de la traite en 2016. Les ONG ont identifié 6 353 cas d’exactions commises sur des enfants travaillant comme domestiques, signes de travail forcé ; une ONG a également identifié 1 258 victimes du travail des enfants privées de soins adéquats ou de services publics, marginalisés, ou vivant dans des conditions difficiles et des régions isolées, ce qui les rendait plus vulnérables à la traite. Les autorités n’ont pas signalé avoir soustrait d’enfants de situations d’exploitation, les avoir orientés vers des services de prise en charge, ou avoir enquêté sur des infractions potentielles liées au travail forcé. Au cours de la période visée par le présent rapport, 24 Mauritaniennes ont été identifiées en situation de servitude domestique dans les États du Golfe.
Les pouvoirs publics ne fournissaient pas d’appui en espèces ou en nature aux ONG qui ont continué de fournir la majorité des services de protection aux victimes de la traite. Le ministère des Affaires sociales, de l’Enfance et de la Famille (MASEF) a continué de gérer sept centres publics pour la protection et l’intégration sociale des enfants, auxquels les enfants victimes de la traite avaient accès. Au cours de la période visée par le présent rapport, ces centres ont fourni des services à 540 enfants, par rapport à 373 dans le rapport précédent. Cependant, le nombre d’entre eux qui étaient victimes de la traite n’était pas clair. La brigade spéciale des mineurs avait l’autorité nécessaire pour orienter ces enfants vers ces centres, mais il n’est pas clair si elle le faisait dans la pratique et si d’autres responsables des forces de l’ordre étaient au courant de ces procédures. L’État a alloué 35 millions d’ouguiya (98 600 dollars É.-U.) à ces établissements pour le paiement des salaires du personnel et l’assistance psycho-sociale, soit une baisse notable par rapport aux 76,9 millions d’ouguiya (217 000 dollars É.-U.) qui leur avaient été attribués durant la période visée par le rapport précédent. Ces établissements ne fournissaient qu’une protection de courte durée et, même en situation de traite, rendaient généralement les enfants à leur famille ou aux imams qui avaient contribué à leur exploitation. Le MASEF a parfois orienté des enfants vers d’autres centres publics ou des établissements dirigés par des ONG pour y recevoir une prise en charge supplémentaire et une formation professionnelle ; le fonctionnement de ce système d’orientation et l’éventuelle dispense de services supplémentaires aux victimes de la traite manquaient de clarté. Il n’existe pas de foyers d’hébergement destinés spécifiquement aux victimes de la traite, y compris aux adultes ; les victimes doivent quitter les centres du MASEF à l’âge de 18 ans. La Tadamoun pouvait offrir une assistance aux victimes de l’esclavage, en général sous la forme d’activités génératrices de revenus ; elle a signalé avoir fourni une assistance à 61 victimes de l’esclavage depuis 2013, même s’il n’était pas clair combien, si tant est qu’il y en ait, avaient reçu une telle aide au cours de la période visée par le présent rapport et comment faire pour y accéder. Le manque de services de réhabilitation à long terme rendait les victimes identifiées vulnérables à de nouvelles situations de traite.
La loi de 2015 sur la lutte contre l’esclavage prévoit l’apport d’une assistance judiciaire complète aux victimes de l’esclavage héréditaire, exigeant des responsables publics qu’ils leur fournissent des informations sur leurs droits et les exemptent des frais de justice ; on ne sait toutefois pas si les pouvoirs publics ont appliqué ces dispositions au cours de la période visée par le présent rapport. La loi prévoyait également la création de centres d’appui pour faciliter l’apport de cette assistance dans chaque province, mais il n’en a pas été établi au cours de la période visée par le présent rapport. De surcroît, la loi prévoit la fourniture par les pouvoirs publics d’une compensation aux victimes, mais les responsables publics n’ont pas indiqué si des victimes en avaient bénéficié au cours de cette période. Si les victimes peuvent demander des réparations à leurs trafiquants, la complexité et l’opacité du système juridique rendaient de telles demandes extrêmement difficiles. Aucun rapport n’a signalé que le gouvernement avait détenu, frappé d’une amende ou emprisonné des victimes pour des actes commis en conséquence directe d’avoir fait l’objet de la traite des personnes. Cependant, l’absence de mesures d’identification des victimes de la traite au sein des populations vulnérables a vraisemblablement mené à la pénalisation de certaines victimes. Ainsi, les autorités ont souvent incarcéré des femmes soupçonnées de prostitution et maintenu en détention des migrants en situation irrégulière jusqu’à ce que leur soit accordé le statut de réfugié. En 2016, le ministère de l’Intérieur a renvoyé 5 800 travailleurs étrangers dans leur pays d’origine sans rechercher des signes de traite des personnes. La Mauritanie n’offre pas aux victimes étrangères d’autre choix juridique que leur expulsion vers des pays où elles risquent de faire face à des conditions difficiles ou à des représailles.
PRÉVENTION
Le gouvernement a maintenu de modestes efforts de prévention de la traite des personnes. Aucun organe public unique n’était responsable des efforts nationaux de lutte contre la traite, ce qui nuisait à l’efficacité des pouvoirs publics. Le gouvernement n’a pas finalisé son projet de plan d’action national. Contrairement aux engagements qu’il avait pris au cours de la période précédente, il n’a pas détaché de personnel pour la mise en place de sa feuille de route 2014-2017 visant à lutter contre les séquelles de l’esclavage, plan séparé élaboré en collaboration avec une organisation internationale. Le comité interministériel de lutte contre l’esclavage, placé sous l’autorité du Premier ministre et responsable de la mise en œuvre du plan d’action, s’est réuni trois fois au cours de la période visée par le présent rapport, par rapport à deux fois pour la période précédente, sans cependant faire d’efforts tangibles visant à le mettre en œuvre. La Tadamoun a continué de construire des écoles et de proposer des activités génératrices de revenus dans les zones touchées par la pauvreté, en se concentrant surtout sur les communautés de descendants d’esclaves et les groupes vulnérables à l’exploitation. Le gouvernement, en partenariat avec des organisations internationales, a organisé deux ateliers sur la traite. Le premier a traité la question des droits des enfants dans les écoles coraniques, en encourageant la modernisation de leurs méthodes pédagogiques et en soulignant les protections juridiques à la disposition des élèves dans un effort de réduction du nombre de cas de mendicité forcée. Le second atelier a permis de former 50 magistrats et autant de greffiers sur la définition de la traite, la distinction entre traite des personnes et immigration clandestine, et un passage en revue des cadres nationaux et internationaux de lutte contre la traite des personnes, sans toutefois aborder la loi de 2015 sur la lutte contre l’esclavage. Le gouvernement a poursuivi sa campagne d’enregistrement de l’ensemble des citoyens et résidents étrangers et de délivrance de pièces d’identité biométriques sûres. Cependant, malgré ces efforts, une part importante d’enfants ne possédait toujours pas de pièces d’identité, ce qui en empêchait certains de s’inscrire à l’école, les rendant plus vulnérables à la traite. Les autorités n’ont rien fait pour réduire la demande de travail forcé ou d’actes sexuels tarifés. Bien que de nombreux Mauritaniens aient été recrutés frauduleusement pour travailler à l’étranger, le gouvernement n’a rien fait pour contrôler les embauches ou enquêter sur les embaucheurs ou intermédiaires présumément impliqués dans ces embauches frauduleuses. Il n’a pas dispensé à son personnel diplomatique de formation en matière de lutte contre la traite des personnes. En revanche, un bailleur de fonds étranger a dispensé une formation sur les droits de l’homme qui abordait ce sujet aux troupes mauritaniennes avant leur déploiement à l’étranger dans le cadre de missions internationales de maintien de la paix.
CARACTÉRISTIQUES DE LA TRAITE DES PERSONNES
Conformément aux rapports de ces cinq dernières années, la Mauritanie est un pays d’origine, de transit et de destination pour les hommes, les femmes et les enfants victimes du travail forcé et de la traite à des fins d’exploitation sexuelle. Des adultes et des enfants originaires des castes traditionnellement esclaves des communautés maures noires et afro-mauritaniennes sont assujettis à des pratiques liées à l’esclavage héréditaire ancrées dans les relations ancestrales maître-esclave, où ils sont forcés à travailler, sans rémunération, comme gardiens de troupeaux et domestiques. Il n’existe pas de données fiables sur le nombre total d’esclaves, mais les experts locaux et internationaux s’accordent pour dire que l’esclavage héréditaire continue de toucher une part importante de la population, aussi bien en milieu rural qu’en milieu urbain. Par ailleurs, des garçons originaires de la Mauritanie ou d’autres pays de l’Afrique de l’Ouest écoliers d’écoles coraniques se retrouvent assujettis à la mendicité forcée à la recherche de nourriture et d’argent par des imams corrompus afin de leur procurer des revenus. Des garçons des familles à faible revenu de la communauté poular sont les plus vulnérables à la mendicité forcée imposée par des imams sans scrupules. Des gangs des rues forcent les enfants mauritaniens à mendier et à vendre de la drogue à Nouakchott. Environ 41 % des enfants mauritaniens n’ont pas de certificat de naissance et ne sont donc généralement pas autorisés à s’inscrire dans le système scolaire, ce qui accroît pour eux le risque de tomber victimes de la traite. Des femmes et des filles mauritaniennes, en particulier celles qui appartiennent aux castes traditionnellement esclaves et aux communautés afro-mauritaniennes, ainsi que des femmes et des filles originaires du Mali, du Sénégal, de la Gambie et d’autres pays de l’Afrique de l’Ouest, sont soumises de force à la servitude domestique en Mauritanie, parfois par des recruteurs qui promettent frauduleusement aux parents qu’ils assureront l’hébergement et l’éducation de leurs enfants. Des femmes et des filles ouest-africaines sont vulnérables à la servitude domestique et à la traite à des fins d’exploitation sexuelle en Mauritanie. Des migrants venus d’Afrique subsaharienne transitent par la Mauritanie vers le Maroc et l’Europe, où certains se voient astreints au travail forcé et à la traite à des fins d’exploitation sexuelle. Des femmes et des filles mauritaniennes sont embauchées frauduleusement par des agences de recrutement étrangères et des intermédiaires mauritaniens comme infirmières et enseignantes à l’étranger pour se voir contraintes au travail forcé et à la traite à des fins sexuelles dans les pays du Golfe, notamment en Arabie saoudite. Des hommes venus du Moyen-Orient et du Maghreb se servent de contrats valides de « mariage provisoire » pour exploiter sexuellement des jeunes filles et des femmes mauritaniennes. Issues de familles pauvres, attirées par des promesses de paiements substantiels, elles contractent ces mariages forcés facilités par des intermédiaires et des agences de voyage en Mauritanie ainsi qu’au Moyen-Orient et se retrouvent exploitées en tant qu’esclaves sexuelles en Arabie saoudite et dans d’autres pays du Golfe. Au cours de la période visée par le présent rapport, les autorités internationales ont identifié et soustrait d’un camp de réfugiés dans le sud-est de la Mauritanie six enfants soldats maliens contraints au travail forcé comme cuisiniers, porteurs, serviteurs et messagers pour des groupes rebelles situés au Mali. La frontière entre ces deux pays limitrophes étant perméable, il est possible que des groupes armés maliens aient recruté des enfants mauritaniens par la force.

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