Libération de MM. Biram Ould Dah Abeid et Brahim Ould Bilal Ramdane (OMCT-FIDH)
Nouvelles informations
MRT 002 / 1114 / OBS 088.5
Libération
Mauritanie
19 mai 2016
Mouvement mondial des droits humains
L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et de la FIDH, a reçu de nouvelles informations sur la situation suivante en Mauritanie.Nouvelles informations :
L’Observatoire a été informé par des sources fiables de la libération de MM. Biram Ould Dah Abeid, président de l’Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste (IRA-Mauritanie), et Brahim Ould Bilal Ramdane, vice-président de l’IRA-Mauritanie.
Selon les informations reçues, le 17 mai 2016, la Cour suprême a annulé l’arrêté de la Cour d’appel d’Aleg en date du 26 août 2015 confirmant la peine de deux ans de prison à l’encontre de MM. Biram Ould Dah Abeid et Brahim Ould Bilal Ramdane pour « appartenance à une organisation non reconnue » et « rassemblement non autorisé » (articles 191/192 et 193 du Code pénal), suite à leur participation à une campagne de sensibilisation contre l’esclavage (cf. rappel des faits).
Le président de la Cour suprême a motivé l’arrêté rendu par la requalification des faits en « rassemblement non armé » (article 102 du Code pénal), passible d’un an d’emprisonnement. Les détenus ayant déjà purgé plus d’un an en prison, la Cour a ordonné leur libération immédiate.
Il convient par ailleurs de noter que cette décision s’applique également à M. Djiby Sow, président de l’ONG Kawtal Ngam Yellitaare, qui avait été arrêté en même temps que MM. Brahim Ould Bilal Ramdane et Biram Ould Dah Abeid, mais qui avait bénéficié d’une libération provisoire en juin 2015 pour raisons de santé.
L’Observatoire se félicite de la décision de la Cour suprême et de la libération de MM. Brahim Ould Bilal Ramdane et Biram Ould Dah Abeid, et remercie toutes les personnes, institutions et organisations qui se sont mobilisées en sa faveur.
L’Observatoire rappelle néanmoins qu’ils ont été détenus arbitrairement plus d’un an et demi, leur détention ne semblant viser qu’à sanctionner leurs activités de défense des droits de l’Homme, et au cours de laquelle leur état de santé s’est considérablement détérioré.
L’Observatoire appelle les autorités mauritaniennes à mettre un terme à toute forme de harcèlement, y compris au niveau judiciaire, à leur encontre et, de manière plus générale, à l’encontre de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme mauritaniens.
Rappel des faits :
Le 7 novembre 2014, MM. Biram Ould Dah Abeid, Brahim Ould Bilal Ramdhane, Khattri Rahel, président du Comité de la paix de l’IRA-Mauritanie, Abidine Matalla, membre du bureau exécutif de l’IRA-Mauritanie, Samba Diagana et Hassane Mahmoud, membres du Comité de la paix de l’IRA-Mauritanie, Dah Boushab, président de la section d’Arafat de l’IRA Mauritanie, Mohamed Yacoub, membre de l’IRA-Mauritanie, ainsi que MM. Cheikh Vall et Djiby Sow, militants anti-esclavagistes, ont lancé une caravane sillonnant le pays afin de dénoncer « l’esclavage foncier et les expropriations foncières », un système qui contraint les membres de la communauté Haratine à devenir des travailleurs agricoles sur leurs terres ancestrales.
Le 11 novembre 2014, M. Biram Ould Dah Ould Abeid ainsi que les neuf autres organisateurs ont été arrêtés. Le lendemain, la police a fermé le siège de l’IRA à Nouakchott. L’IRA-Mauritanie, qui n’avait jamais reçu d’autorisation officielle en dépit de ses demandes répétées, était sous la menace d’une telle interdiction à tout moment, ce que le bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme en Mauritanie a dénoncé comme « une application arbitraire de la loi ».
Le 14 novembre 2014, MM. Biram Ould Dah Abeid, Brahim Ould Bilal Ramdane, Khattri Rahel, Cheikh Vall, Abidine Matalla, Samba Diagana, Hassane Mahmoud, et Mohamed Yacoub ont été inculpés par le juge d’instruction pour « attroupement et rébellion », « incitation à la révolte » et « refus d’exécuter les ordres des autorités administratives », avant d’être transférés à la prison de Rosso, tandis que MM. Djiby Sow et Dah Boushab ont été placés sous contrôle judiciaire.
Le 24 décembre 2014, le parquet de Rosso a requis cinq ans de prison ferme contre M. Biram Ould Dah Abeid et huit autres militants de l’IRA-Mauritanie pour « appartenance à une organisation non reconnue » et « rassemblement non autorisé ». M. Djiby Sow était lui aussi poursuivi pour « rassemblement non autorisé ».
Le 15 janvier 2015, la Cour correctionnelle de Rosso a condamné MM. Djiby Sow, Biram Ould Dah Abeid et Brahim Ould Bilal Ramdane à deux ans de prison pour « appartenance à une organisation non reconnue » et « rassemblement non autorisé ». Les sept autres inculpés ont été acquittés et libérés le jour même.
Le 3 mars 2015, des calculs rénaux ont été diagnostiqués chez M. Djiby Sow. En raison de son état de santé très précaire et à la suite de son admission répétée au service de réanimation de l’hôpital de Nouakchott, les autorités judiciaires mauritaniennes ont finalement ordonné, le 26 juin 2015, sa libération provisoire.
Le 25 août 2015, M. Biram Ould Dah Abeid a été admis à l’hôpital d’Aleg suite à de vives douleurs au dos et à la jambe.
Le 26 août 2015, la Cour d’appel d’Aleg a confirmé la peine de deux ans de prison de MM. Biram Ould Dah Abeid et Brahim Ould Bilal Ramdane. Deux jours plus tard, les avocats des deux défenseurs ont intenté un pourvoi en cassation.
Dès le début de sa détention en novembre 2014, M. Ould Dah Abeid a souffert d’hypertension, de douleurs sérieuses à l’abdomen et à la jambe et de troubles graves du sommeil. En dépit de cet état de santé, ce n’est que le 18 octobre 2015 que le médecin chef de l’hôpital d’Aleg et le directeur de cet hôpital ont réussi à l’ausculter dans sa cellule. Les deux médecins avaient alors préconisé le transfert urgent de M. Biram Ould Dah Abeid à l’hôpital de Nouakchott afin de recevoir les soins médicaux adéquats pour une possible hernie discale. Ces mêmes médecins avaient annoncé craindre des complications médicales si M. Ould Dah Abeid n’était pas pris en charge immédiatement. Le 19 octobre 2015, les médecins auraient informé le représentant du ministre de la Justice ainsi que le procureur du Tribunal d’Aleg que le rapport sur l’état de santé de M. Ould Dah Abeid était prêt à être remis aux autorités ainsi qu’à la famille de M. Ould Dah Abeid. Le procureur aurait refusé cette remise, confisqué les copies du rapport médical, et menacé les deux médecins de représailles s’ils tentaient d’en reproduire une copie pour M. Ould Dah Abeid ou sa famille.
Le même jour, M. Biram Ould Dah Abeid a été ausculté une seconde fois au dispensaire de la prison par deux médecins neurologues venus de Nouakchott qui ont confirmé le premier avis médical.
Le 14 novembre 2015, MM. Biram Ould Dah Abeid et Brahim Ould Bilal Ramdane ont été transférés depuis la prison d’Aleg vers la prison civile de Nouakchott.
Le 16 novembre 2015, M. Ould Dah Abeid a été présenté à un médecin spécialiste à l’hôpital neuropsychiatrique de Nouakchott, qui a confirmé que M. Ould Dah Abeid souffre d’une hernie discale.
Actions requises :
L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités mauritaniennes en leur demandant de :
i. Garantir en toute circonstance l’intégrité physique et psychologique de MM. Djiby Sow, Biram Ould Dah Abeid et Brahim Ould Bilal Ramdane, ainsi que de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme en Mauritanie ;
ii. Mettre un terme à toute forme de harcèlement, y compris judiciaire, à l’encontre de MM. Djiby Sow, Biram Ould Dah Abeid, Brahim Ould Bilal Ramdane, de l’ensemble des membres et sympathisants de l’IRA et, plus généralement, de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme en Mauritanie ;
iii. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement ses articles 1, 9.1 et 12.3 ;
iv. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par la Mauritanie.
Addresses :
• S.E M. Mohamed Ould Abdel Aziz, Président de la République Islamique de Mauritanie, Fax : 00 222 525 85 52
• M. Mohamed Ould Mohamed Raré, Ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation de la République Islamique de Mauritanie, Fax : + 222 529 09 89 ; Email : mmelhadi@interieur.gov.mr ; leminesidi@yahoo.fr
• Sidi Ould Zeïne, Ministre de la Justice de la République Islamique de Mauritanie, Fax : 00 222 525 70 02
• M. Cheikh Tourad Ould Abdel Malick, Directeur des droits de l’Homme, Commission nationale des droits de l’Homme, Email : ctmohamed2000@yahoo.fr
• S.E. Ambassadeur Mme Salka mint Yamar, Mission permanente de la Mauritanie auprès de l’Office des Nations unies à Genève, Suisse. Fax : +41 22 906 18 41. Email : mission.mauritania@ties.itu.int
• Ambassade de la Mauritanie à Bruxelles, Belgique, Fax : +32 2 672 20 51, Email : info@amb-mauritania.be
Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques de Mauritanie dans vos pays respectifs