Portraits des 13 militants – Moussa Bilal Biram dit Pape : « Affable et généreux dans l’effort ! » (aidara)

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Condamné à 15 ans de prison ferme

Par : THIAM MAMADOU

Du haut de ses 2 mètres, Moussa Ould Bilal Ould Biram (Pape pour les intimes, Senseï, selon ses disciples) ne laisse personne insensible. Sportif accompli, Moussa est d’un tempérament plutôt calme et posé, affable et généreux dans l’effort, et profondément religieux. Né en 1967 à Keur Macène, Moussa est ceinture noire 4ème dan. Ce père de famille (cinq enfants  – 4 filles et un garçon) qu’il prenait en charge, ne cessait aussi de régler, par-ci et par-là, discrètement, quelques petits problèmes dans son fief, à Sebkha. « Il s’est toujours rangé du coté des faibles  et n’a cessé de ‘casser’ les classes d’âges », indique Babou, jeune militant de IRA et membre de la section de Sebkha.

Apprécié aussi bien par les jeunes, les femmes que les vieux, Pape a su tisser dans les différents quartiers de la Sebkha, de relations fécondes bâties sur une amitié sincère, un respect mutuel. « C’est un homme pacifique, engagé et fin stratège », souligne Kaw, son compagnon de lutte.

Des années glorieuses où ses affaires faisaient florès, Pape aura été l’un des distributeurs automatiques  du mouvement IRA qui finira au bout du compte par tomber en faillite. La politique coûte cher et fait couler des initiatives privées. La grande salle de peinture du cinquième et dojo de karaté la nuit, symbole de réussite, lui fileront entre les doigts. Le dojo, fréquenté par de nombreux sportifs de la Sebkha, finira par fermer. Il sera combattu par les dirigeants de la Fédération mauritanienne de karaté qui entendaient lui faire payer son « orientation politique ». Des policiers et même un préfet du département lui notifieront les décisions de fermeture de son dojo non affilié à la Fédé avant de se raviser. Les rares fois qu’il aura accompagné la délégation officielle de budoka mauritanien, senseï Moussa n’en garda pas de bons souvenirs. En 2014 aux championnats d’Afrique, à Dakar, les athlètes mauritaniens ont du passer deux nuits à la belle étoile faute d’arriérés de cotisations. Pour avoir dénoncé cette situation, Moussa sera de nouveau combattu par ses propres congénères. Il sera mis encore sous embargo par la Fédé de karaté. Mais, il n’en a cure !

Que de souvenirs chagrinant ses anciens adeptes. Croyant au bien-fondé de la lutte pour l’émancipation de sa communauté et de la défense des opprimés, Moussa Ould Biram, loin d’être ébranlé par cette faillite, dépense sans compter. Lors de la présidentielle de juin 2014, il n’hésitera pas une seconde à vendre sa voiture, une Mercedes 190 acquise sur fonds propres, pour financer la campagne de son candidat Biram Dah Abeïd, dans le département de Sebkha. Loin d’être ébranlé par cette perte et la défaite de son candidat, Moussa continue son militantisme en prenant part à toutes les manifestations initiées pour la libération des leaders du mouvement et contre l’enrôlement sélectif des populations noires.

Connu pour son dévouement au travail, le vice président de la section IRA de Sebkha, deviendra plus tard taximan, activité qu’il mènera jusqu’à son arrestation.  « Persévérant, Pape ne se laisse pas abattre », renchérissent ses camarades. « Moussa a été forgé par la nature et a connu toutes les épreuves de la vie », font-ils remarquer. « C’est Moussa qui est le concepteur de nos slogans. Il a de l’imagination  », révèlent Kaw et Babou. Lors des tournées de précampagne et de campagne, Moussa sera un renfort de taille pour la garde rapprochée du candidat Biram Dah Abeïd.

Ayant pris l’habitude de s’enchaîner symboliquement à chaque manifestation de IRA, Moussa Biram a, se félicitent ses camarades, marqué les esprits et surtout celui du  Président de la République.

Lors de son  discours à Néma, Mohamed Ould Abdel Aziz avait laissé entendre que : « L’esclavage en tant que tel n’existe pas. Mais, il y a des gens qui s’enchaînent qui se font passer comme esclaves et postent ça sur le net  et les télévisions. Et on ne peut rien contre ces gens ».

Accusé d’avoir pris part activement aux affrontements du 29 juin et d’avoir incendié le bus de la police, Moussa a été condamné, le 18 août dernier, à 15 ans de réclusion criminelle. Acculé aussi bien  par le président de la cour criminelle que le procureur de la République, Moussa est resté flegmatique. Pape était dans la ligne de mire des autorités depuis un certain temps en attestent les conditions atroces de sa détention et les traitements cruels et dégradants dont il a été victime. On le soupçonne de former des combattants du mouvement abolitionniste aux techniques de combat dans l’optique de la mise en place d’une milice. « Il fallait qu’il en paie le tribut », souffle-t-on. Et ce fut cruel. A la barre, le budoka plaide non coupable et réfute les faits qui lui sont reprochés.

Relatant les conditions de son arrestation et de détention marquées, dit-il, par 72 heures de tortures affligeantes avec privation de nourriture et de possibilité d’aller aux toilettes.

Il avait nommément  cité  ses tortionnaires et évoqué non seulement le refus du procureur de la République de prendre en compte sa plainte contre ses bourreaux et de le faire bénéficier d’une réquisition, de manière à lui permettre d’être ausculté  par  un médecin.

source : http://aidara.mondoblog.org/2016/09/08/moussa-bilal-biram-dit-pape-affable-genereux-leffort/

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