Esclavage en Mauritanie : les chaînes de la honte (Jeune Afrique)
(Jeune Afrique) Par Mehdi Ba
Les abolitionnistes visés
De fait, le président Mohamed Ould Abdelaziz a une tout autre grille de lecture que les organisations de la société civile telles l’IRA ou SOS Esclaves. « L’esclavage n’existe plus dans le pays. Seules subsistent des séquelles de ce phénomène, que nous faisons tout pour traiter », déclarait-il en mai.
Au passage, le chef de l’État décochait une flèche empoisonnée aux abolitionnistes, les accusant de faire de leur cause « un fonds de commerce ». « Les mécanismes de lutte contre l’esclavage ne manquent pas, mais les procédures restent dans les tiroirs », témoigne Aminetou Mint El Moctar, la présidente de l’Association des femmes chefs de famille (AFCF), qui juge que « les esclavagistes bénéficient d’une totale impunité ».
Les abolitionnistes constatent qu’au cours des dernières années une seule condamnation pour esclavage a été prononcée par les tribunaux mauritaniens. Et l’homme a écopé de deux ans de prison seulement, alors que la peine plancher était théoriquement de cinq ans. Il a en outre bénéficié d’une remise en liberté au bout de quatre mois.
À l’inverse, le représentant emblématique de la cause abolitionniste, Biram Ould Dah Ould Abeid, président de l’IRA et candidat malheureux à la dernière présidentielle, est incarcéré depuis novembre 2014 pour avoir lancé une campagne de sensibilisation à l’esclavage foncier dans le sud du pays. Condamné à deux ans de prison, son jugement a été confirmé en appel le 20 août.
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