Note d’alerte FONADH

FonadhNote d’alerte

Déplacement forcé de civils, arrestations et isolement d’opposants, présomption de mauvais traitements

 

I. Contexte

Le 29 juin 2016, des unités de la police nationale, procèdent au déguerpissement de pauvres citoyens qui résident, depuis plus de vingt ans, dans un espace de la capitale Nouakchott, situé en face de l’hôpital ophtalmologique de Mohamed Ould Bouamatou.

470 familles de descendants d’esclaves, dits Hratine, habitaient les taudis, installés sur des dunes inhospitalières. Depuis des années, de riches hommes d’affaires tentent d’obtenir leur expulsion ; ils agitent, à ce titre, des documents de propriété foncière mais se heurtent, toujours, à la résistance des occupants. A aucun moment l’Etat ne proposait, à ceux-ci, une formule de réinstallation sur un site viabilisé.

Le 29 juin, la police envahit le quartier en vue de procéder à une évacuation sous contrainte. Une rude confrontation se solde par des dizaines de blessés, dont des cas assez graves ; les images de télévision et les journalistes témoins rapportent de brèves barricades sur la voie publique, quelques véhicules incendiés et des policiers malmenés par la foule en colère. Plusieurs arrestations sont effectuées dans les rangs des familles. Le lendemain, à la faveur d’un climat moins conflictuel, les autorités organisent une expulsion massive des populations vers des destinations inconnues, sans qu’aucun aménagement préalable n’ait été entrepris pour y créer les moindres conditions d’une vie digne. En parallèle, la police procède, opportunément, à l’arrestation de deux leaders de l’Initiative de résurgence du mouvement abolitionniste (Ira), une organisation de défense des victimes de l’esclavage ; il s’agit du troisième Vice-président, Diop Amadou Tidiane et du Secrétaire général, Balla Touré. Les jours d’après, d’autres camarades, les suivent.

II. Constat

  1. Le nombre des interpellations parmi les groupes de familles déguerpies et leur lieu de détention restent sujets à vérification et confirmation. Ils se répartiraient entre divers commissariats, à Nouakchott.

  2. L’identité des militants de l’Ira privés de liberté et de communication avec leurs familles et avocats, s’établit ainsi :

  1. Amadou Tidjane Diop

  2. Balla Touré

  3. Abdallahi Matalla Saleck

  4. Moussa Biram

  5. Jemal Ould Bleyil

  6. Khattry Ould Rahel

  7. Ahmed Hamdi

  8. Hamady Lehbousse

  9. Mohamed Ijar

Bien à rebours des déclarations du Gouverneur du district de de Nouakchott –Ouest, durant la soirée du 29 juin, tous furent appréhendés hors circonstance de trouble à l’ordre public ; munis d’une liste, des agents de polices les ont saisis, sans mandat judiciaire, aux domiciles respectifs, sur lieux de travail ou dans la rue, parfois avec toute la démesure d’une opération anti-émeutes.

III. Observations

A. Les organisations membres du FONADH souhaitent souligner que les évènements du 29 et 30 juin 2016 illustrent la dégradation continue, des équilibres sociaux ; celle-ci résulte, d’abord, d’un regain de combattivité et de détermination, parmi les couches exclues, face à l’évidence et à la permanence d’un système de domination, d’autant moins réformable qu’il se fige dans la posture défensive du déni. Les incidents du genre pourraient se répéter, voire s’accélérer et rien n’indique, jusqu’ici, une quelconque prédisposition, par l’Etat, à y apporter une réponse lucide sur le fond.

B. Au-delà de la condamnation d’usage qu’une telle brutalité inspire, il importe d’exiger une enquête diligente, pour situer la responsabilité des graves incidents du 29 et 30 juin 2016, entre les citoyens et les forces de l’ordre. D’ici-là, rien ne justifie le maintien, en détention, des victimes de déguerpissement, encore moins des militants anti-esclavagistes.

C. Le contentieux historique de la préséance et de l’hégémonie matérielle continue de receler la principale menace à la cohésion du pays ; or, certains acteurs, confortés en cela par l’expérience universelle, n’acceptent plus le fait accompli et réclament davantage d’équité, notamment pour les générations futures. Ainsi, la conservation de la paix intérieure, sur des bases de durée et de volontarisme, requiert-elle de repenser la Mauritanie de demain, hors des cadres périmés du tribalisme et de l’ethnicité. Cette dynamique de la prévention relève, à présent, de l’urgence. En ce sens, elle ne saurait s’accommoder de la censure, du tabou, encore moins du recours systématique à la coercition.

Nouakchott, le 5 juillet 2016

Les organisations membres du FONADH signataires :

Association Mauritanienne des Droits de l’Homme (AMDH)

Collectif des Rescapés Anciens Détenus Poliques Civils Torturés (CRADPOCIT)

Collectif des Veuves

Comité de Solidarité avec les Victimes des Violatioons des droits de l’homme (CSVVDH)

Groupe d’Etudes et de Recherches sur la Démocratie et le Développement

Economique et Social (GERDDES)

Ligue Africaine de Droits de l’Homme / Section Mauritanie

Regroupement des Victimes des Evénements 89 -91 (REVE)

SOS-Esclaves

Association Des Femmes Chefs de Familles (AFCF)

Association Mauritanienne pour la Promotion de la Culture et de la Langue Sonninke

(AMPCLS)

Association pour la Renaissance du Pulaar en R.I.M (ARPRIM)

Association pour la Promotion de la Langue Wolof en RIM (APROLAWORIM)

Association d’Appui au Développement à la Base des Communautés (SALNDOU)

Association pour le Développement Intègre de l’Enfant (APDE)

Association pour le Renforcement de la Démocratie et l’Education Citoyenne (ARDEC)

Ligue Mauritanienne des Droits de l’Homme(LMDH)

Amnesty International

Anti Savery Inaternational

Minority Right Groups

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