Biram Dah Abeid à Sélibaby et Kaédi, entre discours droits de l’hommiste et discours politique (Thaqafa – Cheikh Aïdara)

Birame Dah Abeid à Sélibaby et Kaédi, entre discours droits de l’hommiste et discours politique

La visite de Birame Dah Abeid au Guidimagha et au Gorgol, du 12 au 17 avril 2022, poursuivait un double objectif, pourfendre l’esclavage traditionnel ancré dans la société soninké par la conciliation et le dialogue entre la classe nobiliaire et la classe servile, mais aussi implanter les structures de base du parti Radical pour une Action Global (RAG), conçu comme le fer de lance de sa prochaine bataille électorale, législatives, communales et présidentielles, prévue à l’horizon 2023-2024.

Birame à Coumba NDaw pour réconcilier les parties en conflit – Crédit Aidara

Beaucoup de gens voyaient dans le voyage du député et président de l’initiative de résurgence du mouvement abolitionniste (IRA), Birame Dah Abeid au Guidimagha, une offensive lancée à l’assaut de la classe féodale soninké au Guidimagha, au-détour d’un prétendu forcing pour ouvrir une mosquée, fermée sous fond de discorde depuis quelques années. En réalité, il n’en fut rien. Cette intrusion dans une structure sociale aussi infuse que la société soninké se révéla être celle d’un médiateur venu refroidir les vives tensions entre les mouvements abolitionnistes et les détenteurs de l’ordre séculaire, plutôt que d’attiser les dissensions.

Accueil chaleureux à Coumba NDaw

Situé à quelques kilomètres de Sélibaby, capitale régionale du Guidimagha, le village de Coumba NDaw fut la première porte d’entrée du député Birame Dah Abeid dans une société soninké réputée pour son cloisonnement.

Les populations de Coumba NDaw venues à l’écoute – Crédit Aidara

Il faut dire que cette visite de Birame Dah Abeid au Guidimagha est une belle revanche pour celui qui en 2017 avait été empêché de rencontrer les populations locales, escorté manu militari de la ville de Gouraye, en provenance du Sénégal, jusqu’à Nouakchott.

A Coumba NDaw, où s’affrontent depuis quelques années, les organisations antiesclavagistes comme Gambanaxou, créées par les membres de la classe servile soninké pour combattre l’esclavage par ascendance et la classe féodale des anciens maîtres, l’intervention de Birame Dah Abeid a été conciliante.

Oumar Ould Yali au milieu d’une haie d’honneur – Crédit Aidara

Devant les foules qui l’ont accueilli, il a déclaré que sa visite au Guidimagha intervient dans un contexte marqué par un vent d’égalité qui souffre au sein de toutes les communautés, mais aussi dans un contexte où s’enfle de plus en plus un regain d’intérêt au sein des groupes traditionnellement dominants qui cherchent à préserver leurs privilèges de classe mises à mal par des revendications et des contestations contre l’ordre établi, celui de la féodalité esclavagiste. Cette révolution sociale traverse selon lui, toutes les communautés, la communauté Beidane comme les communautés Soninké et Pulaar. Ce qu’il nomme les soubresauts contre la fatalité historique et sociale qu’est l’esclavage par ascendance. Cette situation anachronique ne peut, selon lui, résister aux réalités d’un monde devenu un village planétaire et où la circulation de l’information et des connaissances résistent à toutes les pesanteurs.

Veillée nocturne pour écouter le discours de Birame à Coumba NDaw- Crédit Aidara

Selon lui, le mouvement IRA en sa qualité de fer de lance de la lutte antiesclavagiste en Mauritanie offre ce creuset où se concentrent toutes les aspirations des mouvements d’émancipation, d’autant plus que sa reconnaissance en fait aujourd’hui un légitime porteur des voix des opprimés.

Au cours de cette tournée dans le village de Coumba NDaw, Birame Dah Abeid qui était accompagné d’une forte délégation comprenant le président du parti RAG, l’ancien ministre Oumar Ould Yali, a également rendu visite à la classe nobiliaire et au clan des religieux, la famille Cissé. Une rencontre cordiale, pleine de condescendance et de respect et au cours de laquelle, la question de l’imamat et de la distribution des rôles au cours des offices a été débattue avec sérénité.

De la mosquée de Coumba NDaw au congrès de Sélibaby

A Coumba NDaw chez les Cissé – Crédit Aidara

Se basant sur la réalité des faits concernant le conflit autour de la mosquée de Coumba NDaw, Birame Dah Abeid affirme avoir reçu du Wali sortant du Guidimagha et de son remplaçant, la vérité sur la fermeture de la mosquée par le Ministère des Affaires Islamiques, la seule autorité selon lui à autoriser l’ouverture ou la fermeture des mosquées en Mauritanie. Il a brandi dans ce cadre un document retraçant l’accord survenu entre les deux parties en conflit, les descendants d’esclave et la classe religieuse, celle des Cissé.

Au village de NBeiguiya – Crédit Aidara
Birame à l’écoute des villageois – Crédit Aidara

Aux termes de cet accord, la prière des vendredis revenait à la famille des Cissé et les autres prières ordinaires aux Traoré, représentant la classe servile. Seulement, une rixe allait éclater lorsque ces derniers empêchèrent l’Imam Cissé de conduire les offices d’un vendredi, remarquant qu’il refusait de prier les autres prières, pour des considérations de classe, selon l’interprétation qu’ils en firent. Ce qui poussa les autorités à fermer la mosquée pour éviter l’escalade des confrontations.

Birame dans les rues de Bambaradougou à Sélibaby – Crédit Aidara

La tournée au Guidimagha s’est achevée par une visite au village de NBeighira dont les 200 votants en 2019, lui avaient accordé 172 voix contre 40 pour Ghazouani. Birame et sa suite ont ensuite visité l’antique quartier de Bambaradougou, avant le congrès qui a réuni pendant deux jours, des congressistes venus des quatre coins de la région pour élire leurs structures de base.

Congrès de Sélibaby – Crédit Aidara

Le discours pré électoraliste de Kaédi

C’est le 15 avril 2022 que le député Birame Dah Abeid et sa suite ouvrirent à Kaédi, capitale régionale du Gorgol, le congrès d’implantation des structures du parti RAG.

C’est aussi à Kaédi que Birame Dah Abeid allait annoncer les contours d’une offensive pré électoraliste en vue des prochaines consultations. « Je suis le seul candidat à pouvoir battre le candidat du pouvoir, Mohamed Cheikh Ghazouani » a-t-il déclaré devant plus d’une centaine de congressistes venus des quatre départements du Gorgol.

Discours de Kaédi – Crédit Aidara

Par respect aux voix que lui ont donné les habitants de Kaédi lors de la présidentielle de 2019, il a déclaré continuer la lutte pour le bien des Mauritaniens en général et des Kaédiens en particulier. Il est par la suite revenu sur ses relations avec le président Ghazouani, mettant en garde contre les mauvaises langues qui répandent selon lui les rumeurs selon lesquels « Birame n’est plus un opposant ». Ce qui l’amène, dira-t-il en substance à dire que l’objet de sa visite à Kaédi est l’implantation du parti RAG à travers la mise en place de sa coordination régionale. Selon Birame « le parti RAG est le seul parti capable de battre le parti au pouvoir dirigé par le président Ghazouani ».

Congressistes de Kaédi – Crédit Aidara

Birame souligne que la Mauritanie est prise en otage par des pouvoirs militaires successifs qui ont mis le pays à genou et saccagé ses secteurs vitaux, sur le plan moral, social, économique, politique et culturel. Depuis plusieurs décennies, a-t-il précisé, le pays est soumis aux sapes de la gabegie et de la discrimination, détruisant toutes les bases de la vie, l’école, la santé, la fraternité entre les Mauritaniens. Les autochtones sont regardés selon lui par l’administration civile et militaire comme des étrangers dans leur propre pays, sans accès à l’état-civil ni à l’emploi. Le népotisme, le tribalisme et le clientélisme sont devenus, d’après lui, la voie royale pour accéder aux services de l’état.

Birame a aussi expliqué avoir choisi la voie la plus difficile, celle du militantisme au lieu de la voie facile, celle de la compromission et de la soumission à l’ordre établi. Selon lui, aucun des tenants actuels du pouvoir ne s’est frotté aux épines de la lutte contre les injustices.

Enfin, Birame a déclaré devant un parterre de partisans conquis par le jeu subtil du rapprochement, avec quelques passages en Pulaar, qu’il est venu à Kaédi, implanter l’instrument de la lutte qui va mener le peuple vers la victoire contre les injustices et la gabegie, qu’il est venu installer le parti RAG, le parti de l’alternance au pouvoir et de la libération du peuple.

Cheikh Aïdara

 

 

sources :

Birame Dah Abeid à Sélibaby et Kaédi, entre discours droits de l’hommiste et discours politique

http://courrierdunord.com/node/5131

http://futureafrique.net/node/13751

 

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