La Mauritanie épinglé dans le rapport annuel de Human Right Watch (Lakoom)

L’ONG Américaine de défense des droits de l’homme, Human Rights Watch a rendu public ce jeudi 17 janvier 2019, son rapport annuel sur la situation des droits de l’homme dans le monde. Cette année et pour la première fois, elle a consacré tout un chapitre à la Mauritanie. L’ONG reconnait que des progrès ont été enregistrés mais le gouvernement mauritanien est interpellé sur plusieurs points.

La Mauritanie épinglé dans le rapport annuel de Human Right Watch

Nouakchott : Par Bakari Guèye

L’ONG Américaine de défense des droits de l’homme, Human Rights Watch a rendu public ce jeudi 17 janvier 2019, son rapport annuel sur la situation des droits de l’homme dans le monde.
Cette année et pour la première fois, elle a consacré tout un chapitre à la Mauritanie. L’ONG reconnait que des progrès ont été enregistrés mais le gouvernement mauritanien est interpellé sur plusieurs points.

En effet, le rapport souligne que « Les autorités Mauritaniennes ont restreint la liberté d’expression et de réunion, particulièrement lorsque des activistes indépendants protestaient contre le racisme et la discrimination ethnique, la persistance de l’esclavage et d’autres sujets sensibles. »

Et en guise d’illustration de ces manquements HRW donnent comme exemples les emprisonnements des activistes comme le blogueur Mohamed Cheikh Ould Mkhaitir alors qu’il a déjà purgé sa peine pour blasphème et le Sénateur d’opposition Mohamed Ould Ghadda qui a passé la plus grande partie de l’année 2018 en détention préventive « sur la base de vagues accusations de corruption. »

Le rapport comprend plusieurs rubriques classées comme suit :

L’esclavage a décliné, mais n’a pas été entièrement éliminé.

Le rapport note que, outre les pressions sociales, diverses politiques et lois nationales qui pénalisent l’adultère et les crimes de moralité font qu’il est difficile et risqué pour les femmes de dénoncer les agressions sexuelles à la police, ce qui les rend vulnérables à la violence liée au genre.

Les lois Mauritaniennes infligent la peine de mort pour diverses infractions, y compris, sous certaines conditions, le blasphème, l’adultère et l’homosexualité. Un moratoire de fait demeure en vigueur sur la peine capitale et les châtiments corporels qui sont inspirés de la charia islamique et présents dans le code pénal.

Liberté d’expression

A ce sujet, le rapport affirme que des médias locaux en ligne produisent divers points de vue et reportages, critiquant parfois de façon virulente le Président Mohamed Ould Abdel Aziz, qui termine son second mandant en 2019 – d’où les spéculations sur la possibilité qu’il vise un amendement constitutionnel ou une autre disposition qui lui permettrait de rester au pouvoir. Pourtant les procureurs se servent d’une législation répressive, notamment la pénalisation de la diffamation et les définitions très larges du terrorisme et de l’« incitation à la haine raciale », afin de censurer et poursuivre les opposants pour des discours non violents. Une nouvelle loi anti discrimination adoptée en 2017 est venue s’ajouter à cet arsenal. Son article 10 énonce : « Quiconque encourage un discours incendiaire contre le rite officiel de la République Islamique de Mauritanie sera puni d’un à cinq ans d’emprisonnement. »

Le rapport souligne que le 7 août, les autorités ont arrêté Biram Dah Abeid, le Président de l’Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste (IRA), une association qui lutte contre l’esclavage. Cet activiste, qui alors qu’il était en prison a remporté un siège à l’Assemblée Nationale lors des élections de 2018, demeurait en détention provisoire au moment de la rédaction de ce rapport, « inculpé pour avoir soi-disant insulté et menacé un journaliste. »

Autre activiste dont le rapport fait état de son arrestation, il s’agit de Abdallahi Yali qui est lui aussi emprisonné depuis janvier 2017. Il fait l’objet d’un procès qui s’est ouvert le 29 octobre 2018 pour incitation à la violence et à la haine raciale, en vertu du code pénal, de la loi antiterrorisme et de la loi sur la cybercriminalité. Le fondement de ces chefs d’inculpation est à chercher dans des messages WhatsApp où Yali appelait les Haratines, l’ethnie dont il fait partie, à résister à la discrimination et à réclamer le respect de leurs droits. « Les Haratines, des arabophones à la peau sombre qui descendent d’esclaves, constituent un des groupes ethniques les plus importants de Mauritanie. »

Liberté d’association

Au sujet de la liberté d’expression, le rapport rappelle que la loi sur les associations de 1964 exige que les associations obtiennent l’autorisation d’opérer légalement et permet au Ministère de l’Intérieur de refuser cette autorisation en invoquant des motifs vagues tels qu’une « propagande antinationale » ou une « influence fâcheuse sur l’esprit des populations ». Et d’après ce rapport, le Ministère a ainsi refusé la reconnaissance légale à plusieurs associations qui font campagne sur des sujets controversés, telles que l’IRA et « Touche pas à ma nationalité », qui accuse le gouvernement de discriminer les personnes noires lors du processus d’enregistrement à l’état civil.

Selon ce rapport, le 22 juillet dernier, « les autorités Mauritaniennes ont bloqué le départ vers Genève de cinq activistes à la tête d’organisations de veuves et d’orphelins qui réclament que des comptes soient rendus sur la répression exercée par l’État à l’encontre d’Afro-Mauritaniens entre 1989 et 1991, et qui s’opposent à l’amnistie décrétée en 1993 par le gouvernement pour ces événements. » Maimouna Alpha Sy, Aïssata Mamadou Anne, Aïssata Alassane, Diallo Yaya Sy et Baba Traoré devaient participer à l’examen du rapport périodique de la Mauritanie par le Comité des Nations Unies contre la torture.

L’organisation Américaine se félicite que des représentants de Human Rights Watch se sont rendus en Mauritanie plusieurs fois en 2018 et y ont mené leurs recherches sans obstacles. Par contre déplore le rapport, ils n’ont pas réussi à obtenir du gouvernement la permission de tenir une conférence de presse dans un hôtel de Nouakchott en février, et ont dû la tenir dans les locaux d’une organisation locale.

Opposition politique

Le rapport revient sur l’affaire « Mohamed Ould Ghadda ». Au début de 2017, ce sénateur a aidé à tenir en échec une motion présentée au Sénat, soutenue par le Président Abdel Aziz, demandant de dissoudre cet organe, c’est-à-dire la chambre haute du Parlement. En réaction, le Président a appelé à un référendum pour supprimer cette chambre, ce à quoi Ghadda s’est également opposé. En août 2017, cinq jours après que les électeurs ont approuvé la suppression du Sénat, les autorités ont arrêté Ghadda, l’accusant d’avoir accepté des pots-de-vins de Mohamed Bouamatou, un financier exilé et détracteur du Président. (Une fondation créée par Bouamatou, la Fondation pour l’Égalité des chances en Afrique, soutient le travail de Human Rights Watch.) En août 2018, les autorités ont libéré Ghadda après une année en détention préventive. Quatre mois plus tôt, le 25 avril, le Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire a déterminé que la détention de Ghadda était arbitraire. Les poursuites contre lui sont toujours en instance.

Les autorités ont refusé de reconnaître légalement un Parti politique, les Forces progressistes pour le changement, « qui ne mâche pas ses mots sur le thème de la discrimination raciale. Le parti a fait appel de ce refus devant la Cour suprême en 2015, mais attend toujours qu’elle se prononce. »
Esclavage

Le rapport souligne que la Mauritanie a aboli l’esclavage en 1981 et l’a criminalisé en 2007. Le gouvernement soutient qu’il n’existe plus d’esclavage, mais seulement ses séquelles, notamment l’exclusion et la pauvreté extrême – des problèmes qu’il s’efforce de résoudre. L’Indice mondial de l’esclavage estime toutefois qu’il y a 90 000 esclaves en Mauritanie, soit 2 % de la population, y compris les personnes qui subissent des formes « modernes » de cette pratique, comme le travail forcé ou la servitude.

Droits des femmes

En 2017, le Parlement adoptait une loi sur la santé reproductrice qui reconnaît qu’il s’agit d’un droit universel, tout en maintenant l’interdiction de l’avortement. Il a également adopté un Code général sur la protection de l’enfant, qui criminalise la mutilation génitale féminine.
HRW déplore le fait que « les lois mauritaniennes sur le divorce, la garde des enfants et l’héritage sont discriminatoires envers les femmes. »

Enregistrement à l’état civil

Le rapport note que la Mauritanie a continué à mettre en œuvre son processus national d’enregistrement biométrique à l’état civil pour tous ses citoyens et étrangers résidents. Le rapport déplore le fait que « De nombreux citoyens, en particulier les plus pauvres et les moins éduqués, ont eu beaucoup de mal à remplir les lourdes conditions en ce qui concerne les documents à fournir. Certains disent avoir cessé d’essayer de s’enregistrer. Les écoles ont parfois empêché des enfants non enregistrés de s’inscrire, alors que l’instruction est obligatoire de 6 à 14 ans. »

B.G

source : https://lakoom-info.com/la-mauritanie-epingle-dans-le-rapport-annuel-de-human-right-watch/

 

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