Prisonniers d’IRA à Rosso : « Le moral est bon, malgré les agressions et les mauvais traitements »
L’Authentique – La fête d’indépendance, célébrée le 28 novembre 2014 dans la morosité à Nouakchott, est passée presqu’inaperçue à Rosso. Devant la maison d’arrêt, une banale bâtisse encastrée dans le vieux quartier de Satara, un peu en retrait par rapport au grand marché, grouille plusieurs uniformes de gardes.
Des sentinelles surveillent les rues adjacentes, obligeant les riverains à de désagréables détours. Dans un hangar en herbes séchées par le soleil d’été, trône un jeune petit lieutenant qui épluche les autorisations de visite, avant l’accès au bâtiment central.
Prisonniers d’IRA à Rosso
« Le moral est bon, malgré les agressions et les mauvais traitements » Dans la véranda, une bonne dizaine de jeunes gardes se prélassent devant une lourde porte en fer rouge entrelacée de chaînes. C’est dans une pièce contigüe, celle du poste de garde où trône une vieille télé noire et blanc à la carcasse éventrée et une armoire antédiluvienne qu’aura lieu le tête-à-tête avec Birame Dah Abeid.
Visiblement détendu, le visage à moitié mangé par une barbe de quelques jours, le leader du mouvement IRA semblait en forme dans son jogging vert et jaune. « Le moral est bon, malgré la volonté de nos geôliers de nous casser psychologiquement » attaqua-t-il d’emblée.
Cette fois, Birame soutient que lui et ses amis n’accepterons pas une mascarade de sortie. « Nous exigeons un procès et nous voulons que le régime profite de l’occasion pour porter sur la table des accusations, toutes les sales affaires que l’on reproche à IRA, l’argent qu’elle reçoit d’Israël, ses connivences avec l’étranger pour déstabiliser le pays, l’affaire de l’autodafé, tout ! »
Birame semble cependant presque regretter le fait que le régime mauritanien, faute de preuves convaincantes sur toutes ces allégations , soit obligées aujourd’hui de préparer un procès sans fondement, autre que la classique accusation de « rassemblement sans autorisation, appartenance à une organisation non reconnue, rébellion et entraves à forces de l’ordre ».
Le président d’IRA et ses amis se plaignent surtout des mauvaises conditions de détention. « Moi et Brahim Ould Bilal (vice-président IRA), nous partageons une pièce de 2m X 2m sans aucune aération et dans laquelle nous sommes enfermés chaque soir de 18 heures à 8 heures du matin. L’autre pièce occupée par six de nos camarades est aussi sans aération et ne mesure que 3m X 3m ».
Birame pense que son arrestation et celle des militants d’IRA traduit la panique du système dominant face à la popularité de plus en plus grande du mouvement. « Le score que j’ai obtenu à l’élection présidentielle de juin 2014 a profondément surpris le système qui a commencé à prendre conscience du poids politique que je commence à représenter en Mauritanie » explique Birame.
A cette appréhension, se serait ajoutée la progression fulgurante de la diplomatie d’IRA, notamment aux USA. « Les plus grandes organisations des droits de l’homme américaines, celles qui ont le plus grand poids dans les décisions, étaient acquises à IRA et c’est ce qui a augmenté davantage la colère de Aziz à mon égard » a-t-poursuivi.
Quelqu’un lui aurait dit « j’ai vu le gendre d’Aziz, un jeune colonel qui venait de rentrer des USA. Il m’a dit que maintenant ils savent que Birame est devenu irrécupérable, eh bien, ils vont le détruire ».
Tout cela explique ainsi, dira Birame, le fait qu’il était désormais recherché. « La Caravane du foncier serait passée inaperçue si j’avais continué mon voyage sur Dakar et si je ne m’étais pas rendu à leur rencontre » conclut-il.
Pour Birame « il faut dire qu’ici nous sommes enfermés avec de grands criminels ; pour le moment, ils sont sages parce que depuis quelques temps, la drogue n’a pas pénétré dans la prison; il faut envisager le pire, le jour où cela recommencera à envahir les cellules ».
JOB